Santésuisse et l’industrie pharmaceutique lancent le débat sur l’évaluation du bénéfice

Certes, le système de santé suisse reçoit globalement de bonnes notes en comparaison internationale, et les citoyennes et les citoyens se sentent bien pris en charge sur le plan médical; pourtant, l’efficacité ne reçoit pas toujours toute l’attention qui serait nécessaire. La loi sur l’assurance-maladie (LAMal) réclame en effet la preuve de l’efficacité, de l’adéquation et de l’économicité (critères dits EAE) de toutes les prestations des soins de santé primaires ainsi que leur contrôle périodique. Or, à l’heure actuelle, nombre de prestations ne sont pas évaluées ou le sont insuffisamment et ne sont pas contrôlées systématiquement. Les évaluations se limitent à des contrôles ponctuels de prestations isolées – des médicaments par exemple – tandis que la qualité, le résultat thérapeutique («outcome») et l’efficacité des prestations et des traitements ne sont pas analysés. Dans un rapport mandaté par la Commission de gestion du Conseil des Etats, en date de janvier 2009, l’Organe parlementaire de contrôle de l’administration (OPCA) a d’ailleurs également conclu à l’existence de lacunes dans le système d’évaluation et de contrôle des prestations médicales de l’assurance de base.

L’OPCA recommande entre autres de concrétiser la mise en oeuvre des critères EAE ainsi que de clairement séparer sur le plan institutionnel l’évaluation de principe du bénéfice et l’appréciation du bénéfice supplémentaire. Mais les caisses-maladie et l’industrie pharmaceutique identifient aussi les possibilités d’amélioration dans l’évaluation du bénéfice. C’est pourquoi, en tant que partenaires opérant sur une base paritaire, santésuisse et Interpharma ont lancé un projet visant à développer d’ici la mi-2011 un consensus suisse relatif au «Health Technology Assessment» (HTA) incluant les évaluations d’économie de santé. Le projet est suivi par un comité scientifique de pilotage, dont font partie le professeur Michael Schlander (Heidelberg/Wiesbaden), en tant que président, ainsi que le professeur Robert Leu (Université de Berne) et le professeur Gérard de Pouvourville (ESSEC, Paris). Au sein du groupe de projet – dirigé conjointement par Stefan Kaufmann, directeur de santésuisse et Thomas Cueni, secrétaire général d’Interpharma -, l’Office fédéral de la santé publique est également représenté avec le statut d’observateur.

Les HTA sont aujourd’hui considérées comme un instrument important en matière de conseil politique factuel et de prise de décision. Dans de nombreux pays européens, ces procédés sont institutionnalisés et bien implantés. La Suisse connaît les HTA – même si cela n’est pas systématique – pour diverses prestations à la charge de l’assurance de base ainsi que dans le contexte du projet pilote du «Zurich Medical Board». Par leur initiative, santésuisse et Interpharma entendent lancer le débat public sur l’évaluation du bénéfice entre tous les acteurs du système de santé. Ces acteurs se sont réunis en novembre à l’occasion d’un premier atelier de deux jours; un deuxième atelier (au minimum) suivra. «Nous voulons apporter une contribution à la constitution d’un processus HTA suisse, qui reflète tant les conditions générales normatives et institutionnelles que les objectifs suisses en matière de santé et les préférences sociales de la population helvétique», déclare Thomas Cueni, secrétaire général d’Interpharma, à propos du projet. Pour Stefan Kaufmann, directeur de santésuisse, il s’agit en outre, «tout en tenant compte des attentes des assurés suisses vis-à-vis d’une assurance-maladie solidaire, de développer des critères et des principes sur la manière dont il est possible de mettre en oeuvre une évaluation des technologies médicales en Suisse.»

Lors du premier atelier organisé à la Chartreuse d’Ittingen, des experts éminents venus d’Australie, du Canada, des Etats-Unis et d’Europe ont décrit les problèmes, les conflits d’objectifs et les éléments de solution liés à l’évaluation du bénéfice. Non seulement les points forts et les points faibles des modèles HTA d’Allemagne, de Grande-Bretagne, de France et de Suède ont été concrètement débattus, mais les attentes et les objectifs élémentaires poursuivis en Suisse par les assurés, les patients et les citoyens en termes de prestations de leur assurance-maladie ont été identifiés. Fortement tourné vers les expériences internationales, l’atelier constitue un point de départ important pour la formulation de principes fondamentaux relatifs à un processus HTA en Suisse, principes qui devront être débattus en mai 2011 dans le cadre d’un second atelier organisé par santésuisse et Interpharma.

Les enseignements tirés de l’étranger ont montré que les décisions HTA étaient mieux acceptées lorsqu’y étaient associées un large éventail de personnes concernées – notamment aussi des patients et des professionnels de santé. En conséquence de quoi, la manière dont le projet est mené se caractérise par une vaste approche «partenariale». De plus, les partenaires du projet ont créé leur propre page internet www.swisshta.ch. Le projet y est décrit en détail. Les exposés du premier atelier y sont également mis en ligne.

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